Pasos presque oubliés

En 2009, la Néhe inventait sa corrida idéale , sonore et musicale dans « CorriDax », un CD qui reprenait tous les bruits et sons des arènes en fête. Après un détour par les rythmes de l’Amérique du sud, l’harmonie dacquoise est revenue à son port d’attache, les arènes de la cité thermale, pour un nouvel opus baptisé « Toros en Dax ».

Sur la jaquette, les aficionados reconnaîtront la photographie du Fuente Ymbro immortalisé par l’affiche de la feria 2009 et signée Philippe Salvat. « Il ne s’agissait pas d’enregistrer un CD de musique taurine de plus », précise le président et trompettiste Pascal Lacouture. « J’ai demandé à Jean de trouver des morceaux qu’on ne connaît pas, de vieux pasos. »

Sélections et corrections

Jean, c’est Jean Garin bien sûr, le chef d’orchestre bayonnais à la baguette dacquoise. Parmi les 14 morceaux enregistrés fin mai dans l’auditorium de Saint-Jacques-de-Compostelle figure « Juan Leal », le paso composé l’an passé par le musicien pour le jeune torero arlésien.

Jean Garin cosigne aussi « Vida y muerte » avec le chef catalan Galdric Vicens. Sur le CD également, « La Concha flamenca » de Perfecto Artola, sublime partition ourlée de trois solos de trompette, saxophone et clarinette, qui a magnifié la faena d’El Juli lors du dernier Toros y salsa. Comme sur « CorriDax », les Dacquois ont aussi fait appel aux gaïteros d’Ustaritz pour quelques valses. « Il y a énormément de gens qui apprécient la musique taurine, et s’y connaissent, souligne Jean Garin. Il y a aussi plusieurs formes de paso-doble, ceux de concert et les taurins. Les premiers ont des changements de temps, des ralentissements ou des phases sonores qui pourraient surprendre en faena. Alors que le paso taurin doit souligner le geste sans le déranger. »

Mais ce qu’adore le chef de la Néhe, c’est surprendre son auditeur, l’aficionado mélomane qui viendra à la fin de la corrida lui demander quel compositeur se cache derrière telle ou telle musique. Jean Garin s’est donc empressé de répondre à la demande de Pascal Lacouture et a plongé dans la partothèque de la Néhe, d’où il a tiré de vieux conducteurs de chefs d’orchestre. Il a ensuite procédé à quatre sélections : une première au piano, une seconde sur Youtube avec élimination des morceaux trop joués, une troisième avec l’archiviste de l’harmonie, Jean-Marie Palé, à la recherche des partitions de l’ensemble des pupitres.

La dernière a été réalisée en direct, lorsque les 80 musiciens ont commencé à répéter les morceaux choisis : « Nous nous sommes rendu compte qu’il y avait énormément de fautes d’impression sur ces vieilles partitions. Il a fallu passer beaucoup de temps à les rectifier. »

De longues heures soldées par un enregistrement assez rapide au final, bouclé en une soirée et un samedi après-midi, avec l’aide précieuse des deux preneurs de son, Xabi Pellarini et Didier Teillagory. « Cela nous a demandé beaucoup de concentration parce que c’était d’un certain niveau, mais les musiciens et les solistes ont été à la hauteur, reprend Pascal Lacouture. C’est un CD dont nous sommes assez fiers ! »

Une galette à découvrir ce soir en live dans le patio des arènes, en attendant les faenas et la « musica » de l’été.

« Toros en Dax », ce soir à 21 heures, dans le patio des arènes. Entrée libre.

Article d’Emma Saint-Genez, paru dans le Sud Ouest du vendredi 19 juin 2015