Feria de Dax 2019 : vingt années à la tête de l’harmonie de la Nèhe

Jean Garin, le Basque bondissant, fête ses vingt ans à la tête de l’harmonie de la Nèhe. Vingt ans de folie et de sourire qu’il ne perd jamais
« Dans la vie comme dans une harmonie, il n’y a pas de secret, si on veut recevoir, il faut donner », résume Jean Garin comme ce qui pourrait être sa philosophie de vie. Cette année, ce Basque de 69 ans célèbre ses vingt ans de direction musicale de la Nèhe de Dax. Rien que ça.
Lorsque vous croisez le regard de Jean Garin, la simplicité et la modestie se devinent vite. Tout comme la sensation que si vous lui donnez votre confiance, la folie de ses idées vous emmènera loin. C’est justement ce qu’il s’est passé quand il a pris les rênes du groupe d’environ 80 musiciens. « Le chef précédent, Henri Laborde, est parti un peu précipitamment et quand l’ancienne présidente m’a appelé pour lui succéder, elle a voulu qu’on signe un contrat pour ne plus revivre cette situation d’urgence, raconte Jean Garin. J’ai refusé de signer quoi que ce soit, en disant que c’était aux musiciens de décider si je leur convenais et vice versa. Il n’y a jamais eu de contrat et ça fait vingt ans  ! »
Une vague de modernité
Celui qui est aussi compositeur, arrangeur, professeur au Conservatoire national de région Bayonne-Côte basque et au Conservatoire municipal de Dax est arrivé face à l’harmonie dacquoise, en 1999, avec une valise pleine de modernité. « Nous étions un peu dans le creux de la vague. Beaucoup avaient posé l’instrument et le schéma se répétait un peu. Jusqu’à l’arrivée de Jean », confirme le président de l’association, Pascal Lacouture. Petit à petit, ce pédagogue dans l’âme a su manier les ego et les sensibilités pour intégrer batterie, guitare basse, électrique, clavier synthétique et faire basculer l’ensemble dans une nouvelle dimension. Ajoutez à cela le renouvellement des musiciens : « Ça a changé l’harmonie, à Dax, viens  ! », se disaient les élèves de Garin, dans les couloirs du conservatoire, et la prédiction de Lacouture s’est réalisée : « En proposant son nom, j’avais dit que s’il venait, il serait une ventouse à musiciens  ! », confie celui qui connaît l’harmonie de l’intérieur depuis maintenant plus de quarante ans.
Ce qui a également soudé le groupe – qui n’a connu aucun départ pour incompatibilité d’humeur depuis vingt ans – c’est la capacité de Jean Garin à dire ce qui ne va pas, mais aussi ce qui va. « L’harmonie est un milieu parfois dur, dans lequel la rigueur est indispensable mais rien n’empêche de saluer une prestation ou d’encourager. Nous sommes un groupe amateur et un peu de reconnaissance envers les musiciens aide tout le monde à donner le maximum », analyse le directeur musical.
Pampelune et Marciac, l’apogée
Une recette du partage qui déplace les montagnes. Mais comment passe-t-on du creux de la vague à un échange avec la Pamplonesa, immense harmonie professionnelle de Pampelune et référence dans le milieu  ? « Il faut bien vingt ans », rigole le président dacquois. Il faut surtout de la qualité et de l’imagination comme pour ce « cinéma pour les oreilles », en 2011 dans les arènes, avec la projection d’extraits de films, de photos et l’interprétation de bandes originales. Ou encore pour le numéro de cette année, dans le parc, sur le thème du cirque, avec des musiciens en lion, en phoque, Monsieur Loyal et les clowns. Mais la Nèhe a encore plus épaté en réussissant donc à faire venir l’harmonie de Pampelune à Dax, en 2016. Un an plus tard, l’ensemble dacquois faisait le chemin inverse avec un moment inoubliable pour son chef : l’invitation du président de la Pamplonesa à mener l’orchestre espagnol pour un de ses propres morceaux…
L’évocation de ce souvenir laisse le principal intéressé sans voix mais pas sans émotion. Depuis, l’amitié a grandi de chaque côté des Pyrénées, jusqu’à la représentation de la France par la Nèhe pour le centenaire de la Pamplonesa, en juin dernier. « Tout ça a surtout été une histoire de feeling et il ne le dira pas mais évidemment que c’est beaucoup grâce à Jean », affirme Pascal Lacouture. Le feeling est aussi passé avec le festival gersois Jazz in Marciac, l’année dernière, toujours grâce à l’instauration et la maîtrise de cette musique par Garin dans le répertoire de la Nèhe.
Pour le respect du cadre
Ce dernier a clairement fait faire le grand écart à cette institution dacquoise et s’est joué de quelques cadres musicaux, tout en restant fidèle à d’autres : « Pendant les corridas, nous jouerons toujours de la musique taurine, c’est-à-dire le paso doble. Tout simplement parce que pour le respect des convictions de chaque artiste, nous n’avons pas le droit de jouer leurs morceaux dans ce contexte », conclut Jean Garin. Chaque chose à sa place et la Nèhe sera (encore longtemps) bien gardée